Bonjour à tous,
Je me permets de citer ma propre prose d'il y a 2 ans , voir ci-dessous, car :
Ce mercredi 20 septembre la météo aurait dû inciter les plaisanciers à rester au chaud à la maison : avis de grand frais (Suroit) annoncé depuis plusieurs jours. Perso, j'ai annulé une sortie pêche avec mon épouse prévue depuis plus d'une semaine. Mais un intrépide (inconscient), a choisi de quitter Paimpol pour Lézardrieux afin de tester le nouveau pilote automatique de son voilier de 11m.
A 10H30 il se signale en avarie de barre au large de Bréhat, courant portant vers les récifs. A ce moment, nous sommes à bord de la vedette pour une opération de maintenance. Nous captons le Mayday Relay du CROSS, et faisons route dare-dare.
Hélas, dès l'appareillage de la vedette de sauvetage, impossible de joindre le voilier. Aucune réponse à mes appels. Le skipper avait juste eu le temps de donner son n° de mobile au CROSS, mais là encore, pas de réponse à mes appels.
Comme sauveteurs, c'est une situation très compliquée de ne pas pouvoir communiquer avec les personnes en difficulté ("le requérant", dans notre jargon).
A 11h30 nous le prenons en remorque dans des creux d'1,50m, rafales à 35 nds, opération rock'n'roll
sans pouvoir communiquer nos intentions de manoeuvre: Le skipper est malade comme un chien, plié en quatre dans le cockpit du voilier, et son équipier , en équilibre à la proue, secoué comme un prunier, ne comprend pas nos consignes. Le point d'écoute de foc a explosé, et cette p... de voile battante complique la manoeuvre. On arrive quand même à lui passer la remorque par une touline, et à lui expliquer (aux gestes), qu'il doit arrimer la patte d'oie. Chaud, chaud.
Le remorquage va durer plus de 3 heures, et toujours sans possibilité de communiquer. Impossible de s’enquérir de leur état de santé, d'évaluer leur stress, dans la perspective de l'accostage au port de Lézardrieux qui s'avère compliqué compte tenu des rafales qui balaient le Trieux.
A 15h nous sommes assistés par la barge de la Capitainerie pour l'accostage, toujours sans possibilité de les informer des intentions de manoeuvre. Mes copains sont des Mozart de la manoeuvre, le maitre de Port a l'habitude de se coordonner avec notre vedette, on arrive à faire accoster le bateau malgré sa barre bloquée...
Le temps que la tension retombe, je monte à bord pour les "petites formalités". je constate que la VHF à la table à carte est bien opérationnelle, calée sur le canal donné par le CROSS !!! Mais le skipper m'explique que, dès qu'il est descendu dans le carré pour appeler le CROSS, il a été pris de vomissements, et il a dû sortir, laissant la VHF fixe orpheline ... La situation était si difficile que les équipets se sont déversés dans le carré, le panneau de porte arraché empêchant l'accès à la descente. Dans ces conditions de mer, impossible de descendre à la table à carte à chaque vacation radio.
Là, j'explique gentiment mais fermement qu'avec une VHF portable il aurait pu , lui ou son équipier, rester en permanence en liaison avec nous depuis son cockpit, ce qui aurait eu pour effet de les rassurer, de s'enquérir de leur santé (nous ne savions pas leur état), et de coordonner les manoeuvres.
Je vous passe les détails du genre "oui, mais le coup de vent était prévu après 14h"... dans ces cas là nous ne faisons aucun commentaire, l'expérience montre que le requérant est très souvent dans le déni, mais une bonne trouille rétrospective la nuit suivante lui remettra le baromètre à l'endroit.
J'ai peut-être été un peu long (mais notre sauvetage aussi), pour une conclusion qui, elle, sera brève :
-> Ne vous posez aucune question, équipez vous d'une VHF portable, et au premier pépin prenez-la avec vous, calée sur le canal 16. Peu importe que ce soit une portable ASN, peu importe que vous ayez le CCR ou pas (nous, on s'en fout), peu importe ce que vous impose la réglementation ou pas. Là je vous ai raconté un sauvetage récent, avec un voilier, mais dans notre secteur on a vu aussi des vedettes ou des timoniers avec des voies d'eau qui submergent les batteries, des incendies, et autres joyeusetés qui mettent HS le circuit électrique du navire.... Donc, une VHF portable à portée de main, c'est de bon sens.
PS: il y un mois, on a récupéré un petit Jeanneau de 5m genre Palaos, à plus de 6 MN à l'est de Bréhat, en avarie moteur . Pas de VHF à bord ("on l'a oubliée à la maison"), pas de téléphone ("j'avais plus de batterie"). On a eu un mal fou à les repérer ("pourtant on avait dit qu'on voyait Bréhat et les éoliennes" !!! ), 6 à bord de la coque de noix dont 2 enfants, et des adultes sans brassières quand on est arrivés sur eux.... Sans commentaire , ou plutôt si : la place de la VHF, c'est pas sur une étagère à maison !
PPS :
Je suis, vous êtes, nous sommes TOUS des requérants potentiels. Pensez aux sauveteurs qui auront besoin de vous joindre dès lors que vous aurez eu besoin de les joindre. Le 196, çà va pour déclencher les secours, après, c'est la VHF qui doit prendre le relais...
Une VHF portable est fortement recommandée en complément de la VHF fixe, pour diverses raisons de sécurité:
- en cas de panne électrique, la portable reste opérationnelle.
- en cas ne nécessité de sortir de la cabine pour rester en relation avec les secours, la fixe ne sera pas exploitable (encore plus vrai pour les voiliers, où la fixe est à la table à cartes, souvent dans un coin derrière la descente...pas facile d'accès quand il faut monter sur le pont et redescendre à la radio)
- en cas de grave accident, on embarque la portable sur le radeau de survie
Ces derniers mois , lors de plusieurs interventions, notre efficacité aurait été largement améliorée par l'utilisation d'une VHF portable par les personnes secourues: maintenir une conversation avec les secours en restant dans le cockpit (à l'extérieur, très important de nuit ou en cas de visibilité réduite), possibilité pour nous de prendre le gisement de l'émetteur (nous disposons pour celà d'un radio-goniomètre VHF qui indique immédiatement d’où provient le signal, le cap à suivre est calculé en conséquence).
On entend souvent dire que les téléphones mobiles peuvent remplacer la VHF portable. Mais dans la pratique, nous sommes souvent confrontés à des mobiles en panne de batterie, ou inexploitables par les personnes en difficulté (mains mouillées, manipulations parfois complexes et nécessitant les 2 mains, faiblesse des émissions, défaut de housses étanches). Pire, en raison du bruit important dans la timonerie d'une vedette de sauvetage, il est parfois difficile d'entretenir une conversation correcte, obligés de faire répéter, etc.
D'autre part, lors d'une opération de secours ou d'assistance, le CROSS donne un canal de dégagement qui sera utilisé pendant toute l'intervention, et par toutes les personnes impliqués. Ce qui permet des conversations à plusieurs, tout en gardant le contact avec le requérant, qui peut communiquer sur ce canal. Et c'est très important si nous devons mettre notre annexe à l'eau (manoeuvre fréquente sur notre plan d'eau).
Mais le téléphone mobile n'est pas inutile , c'est là le paradoxe : pour prévenir des proches, donner des informations privées à la demande du CROSS ou des services d'assistance médicale...
Résumé : une VHF fixe , évidemment, pour les catégories concernées, mais EN PLUS, une VHF portable qui fera mieux que "dépanner", et sera parfois le média essentiel avec les secours en raison de la mobilité. A condition évidemment que cette VHF portable soit en bon état de fonctionnement. Il faut vérifier régulièrement la charge de la batterie.
...et un téléphone chargé, on n'est jamais trop prudent.
Au prix d'une VHF portable étanche aujourd'hui, il ne faut pas se priver de cet accessoire...qui peut être salutaire.